LA FRACTURATION HYDRAULIQUE:
A quoi ça sert et comment ça marche:

Questions soulevées

Eléments de réponse : Enquête au Québec

A quoi ça sert et comment ça marche:

ATTENTION! : Ne pas confondre un forage pétrolier «classique» et un forage d'exploitation de gaz de schiste!

Pour un puits classique, c'est simple!!! On fore, puis on pompe le pétrole. Parfois, la nappe est sous pression, alors il remonte tout seul!

Dans le cas du schiste, le gaz (ou le pétrole) est prisonnier de la roche, il va falloir le libérer!

C'est là que tout se gâte!

1 - D'abord, on fore, un puits vertical et ensuite horizontal, dans la veine rocheuse.

2 - Ensuite on fait exploser cette veine rocheuse avec des explosifs (pour la fracturer).

3 - Le pire arrive maintenant: on injecte à très forte pression (600 à 1000 bars) d'énormes quantités d'eau dans le puits (10 000, 15 000 et jusque 20 000 m3 d'eau) auxquelles sont ajoutés du sable et surtout plusieurs tonnes (plus ou moins 200 tonnes) de produits chimiques hautement toxiques. Cette injection d'eau écarte les fissures créées par la fracturation, le sable les maintient ouvertes pour libérer le gaz.

4 -Maintenant on récupère le gaz, on sait que 50 à 70% de l'eau chargée de produits toxiques reste au fond. Le reste remonte.

Questions soulevées:

QUELQUES QUESTIONS QUE L'ON POURRAIT SE POSER... A CE STADE...

Lorsque le forage traverse une nappe phréatique, que se passe-t-il???

Quelle garanties peut-on avoir quant à l'étanchéité du tubage du puits???

Qui peut garantir que lors de l'injection d'eau chargée les fissures créées dans la veine rocheuse ne communiquent pas avec les nappes souterraines?

A chaque forage des milliers de m3 d'eau très toxiques sont récupérés, stockés... comment et avec quelles garanties?

Pourquoi ne trouve-t-on nulle part de liste claire des produits chimiques utilisés?

Pourquoi retrouve-t-on des composés radioactifs dans l'eau potable par endroits?

Toute cette eau chargée de matière toxiques qui rete au fond,que devient-elle?

Elle reste au fond ?

elle remonte?

elle ruisselle?

quand et ou?

Eléments de réponse : Enquête au Québec

Les réponses les plus sérieuses qui existent à ce jour à ces questions sont données dans un document qui est le résultat d'une enquête commandée par le Québec.

En voici quelques extraits édifiants autant qu'effrayants:

extrait page 119

"La conception et l'intégrité du puits

Au Québec, la conception actuelle du puits doit être faite selon le Règlement sur le pétrole, le gaz naturel et les réservoirs souterrains. La conception du puits doit assurer que le gaz est bien confiné à l'intérieur des tubages prévus à cet effet et qu'il n'y a pas de risques de contamination des couches géologiques supérieures, des aquifères ainsi que de l'air ambiant à proximité du puits. Les fuites de gaz peuvent cheminer de deux façons : par l'intérieur du puits et de ses enceintes résultant en une fuite éventuelle par les évents ou entre le puits et la formation géologique (migration de gaz). L'Association pétrolière et gazière du Québec mentionne ce phénomène (DB148, p. 58). De son côté, Talisman Energy indique que la possibilité que du gaz ou du liquide remonte à la surface d'un puits, en raison d'une étanchéité incomplète entre le tubage de surface et le ciment ou entre le ciment et la formation adjacente, est faible et que la présence de gaz naturel à la surface n'est pas nécessairement un indicatif d'un écoulement à partir du tubage de surface ou d'une migration de gaz (DM147, p. 23 et 24).

À l'automne de 2010, le ministère des Ressources naturelles et de la Faune a effectué 31 inspections de sites de forage, dont 29 étaient liés à l'exploration du gaz de shale.

De ces 29 sites, 18 présentaient des émanations de gaz naturel alors que pour un site les données étaient en traitement. Les émanations de gaz naturel concernent donc 64 % des puits (DQ28.1, p. 22).

Parmi les signes d'émanation, une migration de gaz naturel a été détectée dans 12 des 28 puits (42 %), alors que les fuites de gaz par l'évent ont été mesurées de façon significative dans 17 des 28 puits (61 %).

Il est à noter que certains évents des 28 puits étaient submergés et que la concentration en méthane n'a donc pu être mesurée (DQ35.1).

D'après Wojtanowicz (2008), la remontée de gaz le long du puits est un indice qu'il y a un problème important d'intégrité du puits, c'est-à-dire que la qualité du scellement entre la formation géologique et le ciment n'est pas adéquate.(...)"


extrait page 124

"Les additifs chimiques

La réalisation de la fracturation d'une formation géologique à l'aide de l'eau nécessite l'ajout de produits chimiques afin de limiter la prolifération de microorganismes, de limiter la corrosion du fer, d'augmenter la viscosité du fluide, de diminuer la friction et l'usage et la protection de l'eau, de faciliter le retour du fluide (DB1, p. 31) Rappelons que, selon Talisman Energy, le fluide de fracturation contient environ 99,5 % d'eau et de sable et 0,5 % de produits chimiques (DM147, p. 41). Selon l'Association pétrolière et gazière du Québec, les produits chimiques utilisés peuvent se retrouver dans divers produits domestiques ou industriels (DM148, p. 46 et 47). Toutefois, l'Institut national de santé publique du Québec a souligné que, parmi les produits utilisés au Québec et pour le shale de Marcellus, huit auraient des propriétés cancérigènes connues (DB93 ; DB83 ; DM100, p. 14). Pour le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, plusieurs des additifs chimiques utilisés peuvent avoir des effets néfastes pour l'environnement (DB1, p. 32). Ces additifs chimiques se retrouvent dans l'eau de fracturation qui va ressortir très tôt après la fracturation ainsi que dans l'eau de production qui va revenir en surface au moment de l'extraction du gaz.

À long terme, il y aurait environ 50 % du volume d'eau utilisé au cours de la fracturation qui demeurerait dans les pores de la formation rocheuse fracturée. Ces eaux usées résultent des activités de forage et de fracturation hydraulique (...)"


extrait page 126

"La contamination résiduelle in situ

La contamination résiduelle in situ résulte du volume d'eau de fracturation qui va demeurer dans le shale d'Utica dont la porosité aura été modifiée par la fracturation hydraulique pour le rendre plus perméable (Groupe de recherche interuniversitaire sur les eaux souterraines, DM103, p. 15). À terme, avec 20 000 puits forés et en considérant que 50 % des eaux de fracturation demeureraient dans la formation géologique, l'exploitation du gaz de shale dans la région visée par ces forages, d'une superficie d'environ 10 000 km2, laisserait environ 200 millions de m3 d'eaux contaminées dans le shale d'Utica, dont une bonne partie verrait sa perméabilité multipliée par un facteur de 500 dans la zone de fracturation (En augmentant la perméabilité par un facteur de 500 signifierait que l'eau pourrait s'écouler 500 fois plus rapidement dans le massif rocheux.) (Mme Nabila Larzeg Larson, DT11, p. 35).

Au regard de la mobilité des eaux de fracturation, une étude du Inner City Fund (2009), partiellement intégrée au document complémentaire du New York Department of Environmental Conservation, indique que, d'après une analyse numérique, la fracturation hydraulique ne présenterait pas de risques prévisibles ayant un impact significatif sur les aquifères (NYSDEC, 2009, annexe 8). Il n'existerait pas au Canada, aux États-Unis ou ailleurs d'étude permettant de valider les modélisations numériques de l'écoulement, car il n'y a pas eu de sites instrumentés ou d'excavations dans les shales où il y aurait eu de la fracturation hydraulique. Dans le cas de fracturations hydrauliques réalisées dans les lits de charbon, le Inner City Fund (2009) cite notamment les travaux de l'EPA qui a analysé 24 sites en 2004 où il y a eu une excavation subséquente pour en extraire le charbon, permettant de vérifier s'il y a eu migration des eaux de fracturation :

[Traduction libre] L'étude sur les lits de charbon a indiqué que les fluides de fracturation suivent les fractures naturelles et peuvent migrer dans les formations supérieures. L'EPA a aussi rapporté que, dans la moitié des cas étudiés, les fluides migraient plus loin et selon un patron plus complexe que ce qui avait été prédit. Dans plusieurs cas d'études sur les lits de charbon, les fluides de fracturation ont pénétré plusieurs centaines de pieds au-delà de la zone de fracturation, soit le long de fractures induites qui ne sont pas demeurées ouvertes ou le long de fractures naturelles dans le charbon2.

D'autres études, dont celle de Myers (2009), présentent des simulations numériques suggérant que des quantités significatives d'eau de fracturation pourraient atteindre les aquifères supérieurs. Selon Myers, l'absence d'observations d'écoulement d'eau de fracturation provenant de la fracturation de shales à des profondeurs de plus de 1 000 m pourrait être expliquée par le temps requis pour franchir la distance entre la zone de fracturation et les aquifères supérieurs, qui pourrait être de plusieurs centaines d'années. Le rapport de Hazen et Sawyer (2009, p. 39) souligne que, lors de l'excavation d'un tunnel, des infiltrations d'eaux profondes auraient été observées et que, dans au moins un cas, ces infiltrations se se produisaient le long de fissures correspondant à un linéament visible en surface. (...)"


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CONCLUSIONS DU RAPPORT:

Conclusion (page 245)

La commission d'enquête a examiné les avenues et a analysé les enjeux liés au développement durable de l'industrie du gaz de shale à partir des faits recueillis et des témoignages de citoyens, de groupes, de municipalités et de l'industrie.

Elle s'est appuyée sur des documents gouvernementaux et scientifiques, des avis d'experts ainsi que sur l'expérience des personnes responsables d'appliquer la réglementation au Québec, ailleurs au Canada et aux États-Unis. Les missions et les visites de terrain réalisées lui ont aussi permis de mieux comprendre le contexte dans lequel s'insèrent l'exploration et l'exploitation éventuelle du gaz de shale au Québec.

Pour certaines questions fondamentales, les réponses sont toutefois partielles ou inexistantes. Pour répondre à ce besoin d'acquisition de connaissances scientifiques et en l'absence de faits probants permettant de déterminer les risques que pourraient comporter l'exploration et l'exploitation du gaz de shale, il est proposé de procéder à une évaluation environnementale stratégique.

Tant que l'évaluation serait en cours, la fracturation hydraulique ne serait autorisée que pour les travaux requis par l'évaluation. Les travaux d'exploration pourraient continuer, mais sans l'utilisation de la fracturation hydraulique. Une telle évaluation constitue un passage obligé, tant pour un processus de prise de décision éclairée que pour la recherche d'une meilleure acceptabilité sociale. En vue de favoriser une cohabitation harmonieuse de l'industrie du gaz de shale avec le milieu, un comité de concertation sur les activités de l'industrie devrait être formé.

Le ministre des Ressources naturelles et de la Faune et le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs devraient évaluer la possibilité de confier à la commission régionale des ressources naturelles et du territoire, instituée au sein de la conférence régionale des élus de chaque région concernée, le mandat de réaliser cette concertation. Après l'analyse, la commission régionale devrait donner son avis sur l'acceptabilité du projet au ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs. Dans le respect des responsabilités de l'État, fiduciaire de la ressource naturelle, les autorités municipales devraient être impliquées pour une gestion intégrée des activités de l'industrie du gaz de shale sur leur territoire.

Des orientations gouvernementales devraient être établies afin de permettre aux municipalités d'encadrer le développement de l'industrie du gaz de shale, comme elles le font pour tout autre type d'industrie, dont les activités agricoles.

L'encadrement actuel de l'industrie du gaz de shale se fait de façon cloisonnée, principalement entre deux ministères en fonction des lois dont chacun est responsable. Cette situation ne favorise pas la surveillance et le contrôle intégrés des activités. En conséquence, il est proposé que les activités d'exploration et d'exploitation soient autorisées par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs de manière à considérer l'ensemble des enjeux environnementaux à l'intérieur d'un même certificat d'autorisation.

Les avis et les orientations formulés dans le rapport visent à améliorer les façons de faire pour assurer notamment un encadrement légal et réglementaire concernant le développement sécuritaire de l'industrie du gaz de shale. Certaines mesures avancées peuvent requérir un certain temps pour être effectives. D'autres propositions ne requièrent pas de modifications législatives ou réglementaires et peuvent être réalisées à court terme, par exemple l'adoption de mesures pour assurer de façon diligente la surveillance des sites de forage relativement aux émissions fugitives de méthane, à la qualité des eaux de surface et souterraines et aux nuisances.

Télécharger le rapport complet : BAPE
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